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Mes mémoires

Jane Avril

138 x 204 mm – 96 pages – Texte – Noir et blanc – Broché

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UGS : 9782355832697 Catégories : ,

Description

Mes bienfaiteurs étaient liés d’amitié avec le célèbre neurologue, le Dr Magnan. Celui-ci me fit admettre à la Salpêtrière dans le service du grand professeur Charcot parmi les grandes étoiles de l’hystérie qui, à ce moment-là, faisaient fureur.

Les plus grands docteurs, les savants les plus réputés du monde entier venaient en foule assister aux séances que le maître présidait, ainsi qu’aux expériences et démonstrations de ses plus fameux sujets.

Je ne sais comment ni pourquoi je fus placée parmi les femmes, car ma place eût dû être avec les enfants.

À quelques jours de là, les Hutt… me prévinrent, par lettre, que ma mère m’y viendrait voir le lendemain. J’en ressentis une telle épouvante que, profitant d’un relâchement de surveillance, je réussis à franchir la grande porte d’entrée que l’on nommait la porte des Champs.

Les préposés m’avaient dû prendre pour une enfant d’employés. Je déguerpis au plus vite et me rendis chez mes bienfaiteurs, qui me rassurèrent en m’assurant que je n’avais rien à craindre de maman et me firent reconduire par la nounou de leur fils à la Salpêtrière, où l’on m’avait cherchée en vain. Je fus, du reste, tancée d’importance.

Le lendemain, dans le parloir de la célèbre Mlle Bottard – dite Bobotte – première surveillante de Charcot, décorée de la Légion d’honneur pour son mérite et ses services exceptionnels, se déroula une scène pathétique.

Ma mère pleura, m’accusant des pires méfaits – imaginaires, disant qu’elle avait sacrifié sa vie pour moi, etc., etc., etc.

Bref, aux yeux des personnes présentes, je dus passer pour un monstre.

Du bon vieil Ambigu.

Elle fut autorisée à me venir voir chaque semaine. Nous passions l’heure de la visite dans les magnifiques jardins de cette grande maison qui est une vraie ville, et déambulions de ceux de la Vierge aux plateaux fleuris qu’on appelait la Hauteur.

De ces entrevues je m’en revenais si malade et épouvantée que l’on finit en haut lieu par s’en apercevoir, et l’on convint que ses visites futures auraient désormais lieu au parloir.

On alléguerait que j’étais punie et privée de sortie.

Je fus bien heureuse de cette décision qui me protégeait contre mon bourreau.

La malice vient aux filles, jusqu’aux plus timides dont j’étais.

Je suis demeurée deux années dans cet Éden – car c’en était un pour moi – tant ici-bas tout est relatif. J’y acquis même une sorte de petite célébrité.

À certains soirs, les grandes me priaient de chanter, ma voix était jolie à ce moment, et, du laboratoire proche où travaillaient des internes, on m’écoutait.

D’aucuns disaient : « Cette enfant est étonnante et sera un jour quelqu’un, on entendra parler d’elle. »

Hélas ! la pauvre n’a jamais pu cultiver non plus qu’exprimer les dons qu’elle possédait alors.

Ballottée dans la vie et demeurée si tard incapable de considérer les choses à leur plan normal, vivant comme dans un perpétuel rêve sans connaître leur valeur, ni même chercher à s’en enquérir !

Tout de même j’en reviens à ce qu’il m’a été donné d’observer en cet endroit.

D’abord il y avait ces folles filles dont la maladie dénommée hystérie consistait surtout à la simuler…

Qu’elles se donnaient de peine afin d’attirer sur elles l’attention et de conquérir la vedette ! C’était à celle qui trouverait du nouveau afin d’éclipser ses semblables, lorsqu’autour de leur lit un nombreux groupe d’élèves que précédait Charcot suivait avec intérêt leurs extravagantes contorsions, arcs de cercle, acrobaties variées et autres gymnastiques.

Plusieurs d’entre elles eurent avec ceux-ci de galantes aventures dont les vivants résultats après quelques mois se faisaient jour. Elles disparaissaient alors pendant le temps nécessaire à ce genre d’événements, après quoi on les voyait revenir telles de pauvres brebis égarées, heureuses de réintégrer le bercail.

De ma mince personne elles n’avaient nulle méfiance – je tirais si peu à conséquence ! – aussi n’hésitèrent-elles point à me mettre dans ce qu’elles appelaient le secret.

Elles me faisaient leurs recommandations : « Lorsque tu verras arriver Un tel ne manque pas de venir près de mon lit et de m’appuyer très fort sur les ovaires. »

Informations complémentaires

Poids 150 g
Dimensions 9 × 138 × 204 mm
Disponible

Oui

Genre

Souvenirs

Édition numérique

Non, Oui

Édition papier

Non, Oui

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